Mercredi 4 avril François Ruffin, député insoumis, revenait à la bourse du travail tenter de lancer une proposition, une grande manifestation avec lui un samedi: #AvecMoile5Mai. L’idée n’est pas de rejouer la Nuit Debout mais Ruffin avait quand même pensé à ramener les mêmes ingrédients: Frédéric Lordon, Loïc de Jolie Môme et la fanfarre qui permet d’éviter que la salle n’émette trop d’idées d’organisation démocratique. Rapidement renommée “La Fête à Macron” histoire d’avoir un but, le #5mai fleurit sur les comptes insoumis et tente de se doter de comités d’organisations. Lordon explique que la date du 5 mai fut choisie par commodité. En effet, le 28 avril la grève des cheminots empêchait les gens de venir en train et puis c’était les vacances de la zone parisienne. Et le 1er mai ça aurait eu l’air d’être à la remorque des syndicats. Donc le 5 mai “Toutes les organisations, politiques, syndicales, associatives, sont invitées à se l’approprier – pourvu qu’elles soient capables du discernement minimal et d’accepter de se fondre dans un ensemble plus vaste qu’elles.” Martinez a annoncé que la CGT ne comptait pas participer.
Le lendemain, 5 avril, Olivier Besançenot, Benoît Hamon, Pierre Laurent et François Ruffin se retrouvaient à Woincourt pour défendre les lignes de proximités…
Ce n’est pas une photo de mouvement social, c’est une photo de future campagne électorale. Si c’était le PS, tout le monde aurait vu, mais là c’est Ruffin qui a l’écharpe d’heureux élu.
“Contre Macron et son monde”. Un slogan de campagne électorale, ça aussi. Un détournement de sens et de lutte: “contre la loi Travail et son monde” visait un rapport social, celui de l’exploitation salariale. “Macron et son monde”, ça ne dit rien, mais ça vise large.
Ruffin est comme ça, exactement comme les autres de la France Insoumise. Il le disait , il y a quelques mois, en pleine campagne réactionnaire et conspirationniste contre la vaccination, contre Macron, il faut utiliser des “trucs à la con”.
Mais , Ruffin, c’est le confusionnisme décontracté, là où Mélenchon est un peu crispé. Ca passe mieux, sur les photos, dans les discours, dans les manifs aussi, où monsieur le député vend Fakir à la criée, sans rien cacher, décontracté.
Et pourtant, Fakir…
Ce journal où dès 2013, Ruffin annonçait la couleur, dans un texte fondateur ” L’air du soupçon”, où il répondait aux antifascistes sur ses collusions idéologiques et pratiques. Ses idées en commun avec le Front National, son peu d’intérêt pour le combat antifasciste. Sa défense de Dieudonné, qui évidemment n’était pas antisémite au départ, mais qui avait été “lapidé ” en place publique , ” sans grand monde pour le défendre” , à part l’extrême-droite. Relire les vieux articles de Ruffin, c’est lire la description de la France Insoumise d’aujourd”hui. Quelque chose qui n’est pas de gauche, qui ne cherche pas à l’être et assume sans peine une partie de Chouard,une partie de Bricmont, une partie de Cheminade, une partie d’Asselineau. Quelque chose qui s’assume ultra-national .
Et c’est ce quelque chose là, qui entend dicter ses dates au mouvement social et y prendre une place centrale. Et pas n’importe quelle date. Siphonner le 1er mai syndical, ce n’est pas rien, en termes de symbolique. Et c’est toute la différence avec la social-démocratie. Le PS aurait cherché à récupérer, la France Insoumise veut dévitaliser et casser.
Comme à l’accoutumée. Comme ils cherchent à casser les luttes pour la révolution syrienne, comme ils cherchent à briser la réaction aux crimes antisémites.
Certes Ruffin n’a pas d’hostilité manifeste envers le mouvement social. Personne ne peut lui nier son immense intérêt pour la lutte de classes. Il est celui qui est persuadé qu’on peut l’emmener vers une issue nationale, en cristallisant en son sein, toutes les tentations fatales entretenues depuis bien longtemps par une partie de la gauche radicale.
En commençant par attaquer les revendications concrètes et les mobilisations syndicales.
Le 5 mai n’est que cela. Le confusionnisme qui vient et qui casse. Reste à savoir si ça passe.