Le nouveau magazine réactionnaire Franc-Tireur, dans son numéro 2, propose une enquête titrée “Europe: braquage à l’islamiste” sur la campagne pro-Hidjab du conseil de l’Europe et l’infiltration islamiste captant les financement européens.
L’enquête, son titre, son sujet et la ligné éditoriale de Franc-tireur induisent l’hypothèse que cette enquête pourrait être basée sur des informations fallacieuses, tronquées voir complètement fausses, ce qui justifie ce fact-checking.
L’hypothèse, à vérifier, est induite par deux choses:
- Le langage parfaitement complotiste: “Sous couvert d’antiracisme, plusieurs associations proches des Frères musulmans ont perçu des subventions aux montants parfois affolants. De quoi imposer leur idéologie et endoctriner la jeunesse par une propagande incessante”. L’obsession sur l’argent et les subventions, le hameçonnage “proche des Frères musulmans permettant d’affilier tout et n’importe quoi à une organisation tentaculaire dont on a déclaré qu’elle était nuisible, les mots clés “idéologie; endoctriner la jeunesse; propagande” qui sont l’apanage des groupes complotiste. Le complot se situant ici au cœur des institutions européennes ce qui permet de lier les peurs islamophobes avec les idées souverainistes. L’islamophobie et le souverainisme fondant le coeur de cible de Franc-Tireur, on peut craindre que cette enquête soit plus proche du clickbait que de la déontologie du journalisme.
- Le contexte islamophobe et d’extrême droite dans lequel se sont inscrit les attaques contre cette campagne du Conseil de l’Europe et qui ont généré un mélange entre faits, fictions, délires d’extrême droite, invention pure et simple et opinion. Une “enquête” sur ce terrain s’avérant donc particulièrement difficile et pas forcément à la portée des éditorialistes réactionnaires qui composent l’équipe de Franc-Tireur, plus habitué aux opinions, aux tweets et tribunes qu’aux faits et aux enquêtes.
On a donc vérifié point par point chaque élément de cette enquête. Les extraits de l’enquête de Franc-Tireurs sont en gras.
“La campagne lancée début novembre par la division anti-discrimination et inclusion du Conseil de l’Europe (CDE) a sidéré. Véritable kit de promotion du voile islamique pour les jeunes, on y trouve des affiches à télécharger, des slogans à relayer comme : « Joie dans le hijab », « Apporte de la joie et accepte le hijab », « Le foulard est une part de moi, de mon identité », mais aussi « La beauté est dans la diversité comme la liberté est dans le hijab » (spéciale dédicace aux Afghanes). La fête. Une affiche appelle même à « accepter les hijabs » avec une photo de femme dont on ne voit que les yeux. Une vidéo de promotion, toujours signée du Conseil de l’Europe, s’amuse à affubler d’un voile une femme sur deux, comme s’il s’agissait d’une mode ludique à essayer. On pleure.”
Ca commence déjà assez mal, voici la liste des slogans que la campagne proposait d’utiliser, le slogan “joie dans le hijab” n’y est pas.
“JoyInHijab” est en fait un hashtag qui apparait furtivement dans la vidéo de promotion et depuis squatté par les racistes. Concernant la vidéo justement, l’affirmation “s’amuse à affubler d’un voile une femme sur deux, comme s’il s’agissait d’une mode ludique à essayer”, est une interprétation. La vidéo montre des femmes non voilées en entier, puis partage l’écran avec une moitié de femme voilée. On montre donc des femmes autant voilées que dévoilées.
L’enquête de Franc-Tireur assure “Paris a également demandé qu’une enquête interne soit diligentée pour comprendre ce qui s’est passé.”
Celà ressemble à une action diplomatique forte de la France souveraine face à l’Europe mondialiste qui veut lui imposer le voile. En réalité il s’agit d’un tweet de la secrétaire d’Etat de la Jeunesse et des Sports Sarah El Hairy daté du 10 novembre et qui indique “Echange franc avec @MarijaPBuric, SG du conseil de l’Europe, où j’ai réaffirmé la position de la France après la diffusion de la campagne “La liberté est dans le hijab”. Une France laïque et universaliste.
Des investigations sont en cours pour établir la chaine de responsabilité.”
Aucune trace de demande d’enquête du coté du Conseil de l’Europe, que ce soit sur le twitter de Marija Pejčinović Burić qui, très diplomatiquement, mentionne la rencontre comme “échange très constructif”, ni sur le site du Conseil de l’Europe qui lui aussi mentionne la rencontre.
La Secrétaire d’Etat de la jeunesse du gouvernement Macron était en fait au 9ème forum mondial pour la démocratie dont le thème était “La démocratie peut-elle sauver l’environnement?” pour participer à un panel le dernier jour entre 10h et 12h. En marge du forum, vers 16h elle a profité de cette occasion pour avoir un meeting avec la présidente du Conseil de l’Europe où elle n’a visiblement parlé que de ça et duquel elle est ressorti avec l’assurance qu’on allait lui trouver des responsables.
C’est la seule et unique chose sur laquelle la Secrétaire chargée de la Jeunesse communiquera concernant ce forum mondial pour la démocratie consacré à la question de savoir si la démocratie peut sauver l’environnement…
Autre élément à charge de “l’enquête” de Franc-Tireur, l’affirmation “Le Conseil de l’Europe n’a rien à voir avec l’Union Européenne.” suivi du paragraphe suivant:
“À l’origine de la campagne de promotion du hijab, on trouve la volonté conjointe de l’Union Européenne et du Conseil de l’Europe de « sensibiliser à la nécessité de respecter la diversité et l’inclusion. C’est dans cette perspective que les institutions européennes ont déboursé 340 000 euros. Cela ne signifie pas pour autant que l’Union connaissait le projet final. Interrogée, la Commission européenne affirme ne pas avoir validé la campagne, rôle réservé au Conseil de l’Europe, référent en matière de droits de l’homme.”
Le conseil de l’Europe et l’Union Européenne ont ils des rapports ou n’en ont-ils pas? La somme de 340 000 euros est-ce vrai? Et l’Union Européenne qui ne connaissait pas le projet final?
En fait c’est très clair et parfaitement exposé dès le départ, sur le site même du projet “We can 4 HRS”, où l’on peut lire en toute lettre “Founded by the European Union, implemented by Council of Europe” suivi de la mention “This project is funded by the European Union’s Rights, Equality and Citizenship Programme (2014-2020) and the Council of Europe. This document represents the views of the author only and is their sole responsibility. The European Commission does not accept any responsibility for the use that may be made of the information it contains.”
Franc-tireur a donc appelé la commission européenne pour lui faire préciser un disclaimer et titrer “Un Conseil Sans Surveillance” afin de faire passer ça pour information…
La somme exacte versée par l’Union Européenne au projet We CAN for Human Rights Speech est de 345 082,90 euros. Le détail au centime près de quelle association a reçu quoi est accessible en ligne.
L’enquête continue: “Cette campagne de promotion du hijab a en effet été pensée en liaison avec le European Forum of Muslim Women (EFOMW). Son logo figure sur plusieurs visuels et documents en compagnie de celui du Conseil de l’Europe.”
Effectivement sur les réseaux sociaux du EFOMW on trouve les visuels de la campagne avec le logo du EFOMW ajouté aux coté des autres…
…car (comme l’avait pourtant noté Franc-Tireur) la campagne comprenait des visuels téléchargeable dans des “toolkits”. On pouvait après téléchargement, à loisir rajouter le logo de son organisation sur les visuels pour indiquer qu’on participait à la campagne. C’est ce qui s’est passé ici et la raison pour laquelle le logo de cette association EFOMW était sur les visuels: parce qu’ils l’y ont mis.
Le visuel tel qu’il était téléchargeable à l’origine, apparait dans le tweet d’un islamophobe hispanophone, sans aucune référence ni aucun logo du EFOMW. Le visuel d’origine en fait, comme l’indique le copyright, été élaboré par une boite de graphisme basé à Skopje, en Macédoine. On notera que la dissimulation islamiste de la Taqqyia va décidemment très loin car la même boite fait aussi des étiquettes de vin et de Raki.
Concernant le EFOMW, leur preuve d’affiliation aux frères musulmans sont, selon Franc-Tireur, la barbe bien taillée et le voile…
L’association est ensuite décrite ainsi: “Le Forum sert de plateforme à des associations fondamentalistes, prônant la non-mixité à la piscine, la méfiance envers l’école (accusée de propager l’athéisme et le darwinisme), quand elles ne glorifient pas des prédicateurs homophobes et antiféministes.”
Pour la piscine on a trouvé un partage d’un article du Guardian relatant l’action de femmes portant le Burkini dans une piscine contre l’islamophobie ambiante sur Facebook. Rien sur Twitter…
Pour l’école et le darwinisme ils n’ont guère plus de preuves. L’affirmation parait quand-même curieuse de la part d’une association où toutes les filles ont des diplômes d’études supérieures, license, master ou sont doctorantes, il apparait difficile d’arriver à ce niveau d’étude en pratiquant la méfiance envers l’école et le rejet du darwinisme…
Franc-Tireur décide ensuite de s’en prendre à une des militantes: “Juste après l’attentat contre Samuel Paty, l’une de ses militantes, Linda Hyökki, déclarait sur le plateau de la chaîne turque pro-Erdogan TRT : « Caricaturer des leaders politiques ou des figures religieuses […] y compris Mahomet, c’est […] toucher à l’identité des musulmans ».”
En fait “juste après” l’assassinat de Samuel Paty, Linda Hyökki a réagit deux fois sur TRT.
Une première fois au discours d’Emmanuel Macron qui annonçait la loi séparatisme par des propos franchement modérés: “this whole idea of how it is impossible to be a muslim nowadays in the west or in Europe, I wouldn’t completely subscribe to that but I would say that definitely it is difficult to find the right kind of spaces to voice our concerns (whatever we are trying to voice in terms of sensitivities our ideas, they are being discredited easily”.
On a connu des “On Peut Plus Rien Dire” moins nuancés…
Les propos relatés par Franc-Tireur, qu’ils tirent d’une seconde vidéo ayant eu lieu 2 jours après, ont effectivement été prononcés d’une certaine manière. Les voici cependant en intégralité dans leur version non coupé:
“This is a very problematic issue. There is a lot of academic research going on about it. I would say this is not a black and white issue in terms of freedom of speech, freedom of speech comes at the same time with a certain degree of responsibility. So on the one hand, basically, a person who wants to use their freedom of speech, they should be also accepting the fact that not everybody is ok with whatever he or she says in public, and at the same time, also I think that producing caricatures of political leaders, or religious speakers is a very sensitive issue, and especially in terms of religious figures. If we are looking at the prophet Muhammad, this is a vicar who is a very important figure in the Muslim religion, and caricatures they touch upon Muslim people deep sensitivity, spirituality and a very intimate part of their identity.”
Le nom de Samuel Paty n’est prononcé dans aucune des deux vidéos. Franc-Tireur qui le mentionne pourtant peut difficilement invoquer le respect du contexte après une telle différence entre les propos tenus et les propos dans leur contexte.
“Loin d’apaiser la montée de la haine en Europe, cette organisation [EFOMW] y contribue. Et c’est logique puisqu’il s’agit de l’une des branches féminines de la Fédération des organisations islamiques en Europe (FOIE), créée par les Frères pour peser sur les instances européennes. Noura Jaballah, membre fondatrice et présidente en 2007, n’est autre que l’épouse d’Ahmed Jaballah, l’ancien président de l’UOIF, l’une des organisations fréristes les plus intégristes de France, de celles qui ont porté plainte contre Charlie Hebdo au moment de l’affaire des caricatures.”
Si les liens de la FOIE avec les Frêres Musulmans ont été largement documentés dans les années 2000, il semblerait que cette organisation n’aie plus trop d’activité depuis au moins 3 ans. Le dernier tweet date de 2018 et le site n’est plus accessible.
Noura Jaballah a effectivement présidé le EFOMW… avant 2014. Et elle est bien la femme de Ahmad Jaballah, dont on constatera sur son site qu’entre le dialogue interreligieux et les bouquins sous la direction de Michel Wievorka, il a vraiment le couteau entre les dents.
Les liens avec le EFOMW semblent surtout le fait de rumeurs sur les réseaux de l’Islam politique. Ces rumeurs ou suppositions, entre liens vrais, supposés, faux, familiaux, proximité idéologique, ancien poste, propos tenus un jour, femme ou fils de… sont relayées, repris et réutilisés dans une grande machine de blanchiment de rumeur. Chacun les reprend d’un autre, l’enquête de Franc-Tireur est largement reprise d’une enquête de Marianne, elle même largement reprise d’autres etc. jusqu’à ce que ces liens finissent par être repris dans des rapports institutionnels ou des médias renommés et finissent admis comme tel, sans qu’il soit besoin de prouver quoi que ce soit.
La version la plus “solide” de ces fameux liens se retrouvent dans le rapport d’un très controversé institut autrichien de “Documentation de l’Islam Politique” (Dokumentationsstelle Politischer Islam). Le rapport prend quand-même soin lui-même de préciser:
“though affiliation with them is unquestionably an indicator of proximity, not every individual or organization affiliated with FIOE/CEM and its satellite entities is a member of the Muslim Brotherhood or part of one of its European milieus”
Avant de faire très exactement cela sur des dizaines de pages.
Dans ce rapport franchement douteux on établit effectivement des liens entre le EFOMW et le FIOE et les Frêres Musulmans sur base du fait que les membres ou anciennes présidentes sont femme ou mère de.
De la part de tous les faux universalistes tellement défenseurs du droit des femmes c’est quand même curieux cette tendance à systématiquement rendre toutes les femmes automatiquement complice idéologiques de leurs maris, frêres, fils…
Le “centre de documentation de l’Islam Politique” qui a établi donc la plus solide preuve de lien entre le EFOMW et les fameux Frêres Musulmans possède sur Wikipedia un chapitre “controverse” quand-même bien, bien fourni. Ils étaient notamment au coeur de la diffusion d’une “Islam Map” révélant publiquement des adresses “islamistes” que les identitaires d’extrême droite n’ont plus eu ensuite qu’à aller cibler.
Franc-Tireur considère néanmoins ces liens comme des preuves irréfutables et continue: Voilà qui n’a pas empêché la division anti-discrimination du Conseil de l’Europe de faire appel à l’une des militantes du Forum [EFOMW], Hajar El Jahidi, pour animer une conférence en septembre 2021. Sans surprise, moins d’un an après la décapitation de Samuel Paty, la tribune offerte sert à présenter la France comme un pays où l’islamophobie est « institutionnalisée ».
La France est un pays où l’islamophobie est institutionnelle, cela peut tout à fait être dit: la loi séparatisme et les dissolutions qui ciblent les associations musulmanes et viennent bien des institutions Française.
Malgré cela on ne trouve pas de traces de la France présentée comme pays où l’islamophobie est institutionalisée dans ce workshop, que ce soit dans la présentation de l’atelier de Hajar el Jahidi ou dans la concept note.
On mentionne bien, entre deux virgules dans la concept note, que “Anti-Muslim hatred and prejudice are now often prevalent in society, across institutional, social, political and economic life” mais la “France” n’apparait nulle part.
Si l’on s’intéresse un peu à Hajar el Jahidi (qui dispose d’un cerveau et d’une pensée autonome sous son voile), elle écrit des articles de fond, argumentés et documentés sur Middle East Eye en citant des rapports et des bouquins contre les discriminations que subissent les femmes voilées et les musulmans en France. Il est tout à fait possible de s’opposer à elle sur le fond ou de contester. Mais attaquer sur le fait qu’elle soit voilée et appartiennent à une organisation qui a eu un jour pour présidente la femme d’un universitaire possiblement proche de l’idéologie des Frêres Musulmans n’est ni politique ni journalistique, c’est du fantasme et du complot…
Franc-Tireur s’attaque ensuite à une autre organisation, la FEMYSO (Forum Of European Muslim Youth And Student Organisations): “Les deux logos, celui de la FEMYSO et du Conseil de l’Europe, apparaissent dès 2011 en couverture d’un rapport intitulé « Combattre l’islamophobie à travers le travail interculturel et interreligieux ». Sur la page de garde, Tariq Ramadan, le prédicateur préféré des Frères musulmans européens, est remercié pour sa « contribution indispensable ». Accusé d’agressions sexuelles, il n’est plus mis en avant, mais son ombre continue de planer sur les associations impliquées dans cette campagne.”
Effectivement voici le rapport et la photo incriminante de 2011. Les accusations contre Tariq Ramadan ont eu lieu en 2017 mais ça Franc-Tireur se garde bien de le rappeler.
Aucune preuve sur le fait que “l’ombre de Tariq Ramadan continue de planer sur cette campagne” dix ans après le rapport et la photo établissant les liens avec Tariq Ramadan, l’affirmation est jetée là comme ça. Dans ces années-là Tariq Ramadan était extrêmement courtisé. Pascal Boniface par exemple se vantait de ses liens avec lui (ainsi qu’avec le rappeur Médine) et Benjamin Sire, aujourd’hui Franc-Tireur, mais jadis rédacteur en chef de Ragemag, offrait en 2013 une interview tribune à Boniface pour lui permettre de se justifier de ces liens et de les d’en faire la promotion. L’interview est encore sur le site de l’IRIS.
Franc-Tireur s’en prend à une autre militante, la présidente du FEMYSO renommé “Forum Islamiste”: “Hande Taner, la présidente de ce Forum de jeunes islamistes a été désignée coordinatrice de la section anti-racisme du Conseil Consultatif de la Jeunesse du Conseil de l’Europe. Un poste clé, qui lui permet de superviser la production du contenu anti-raciste destiné à la jeunesse. Et ce n’est pas tout: Le FEMYSO reçoit aussi de l’argent du Conseil de l’Europe! 13 000 euros en 2014 et 16 500 euros en 2021, au titre du Fonds Européen pour la Jeunesse.”
Le Conseil de l’Europe a une politique à destination de la jeunesse. Faire remonter les besoins des jeunes dans les états membres, aider à l’éducation, élaborer des programmes à destination de la jeunesse etc. A la différence de la République Française dont la secrétaire de la Jeunesse est vouée à la lutte contre la promotion du voile et la pub pour les programmes inspirés des politiques de Pétain comme le SNU, le Conseil de l’Europe souhaite que les jeunes soient impliqués dans la prise de décision. Le Conseil de l’Europe dispose donc d’une structure de Co-Managment, c’est là que se situe le “poste clé” retrouvé par Franc-Tireur.
Dans cette structure de co-managment il y a le European Steering Committee for Youth (CDEJ), composé des représentants des ministères des Etats membres et le Advisory Council on Youth. Ces deux organes forment ensemble le Joint Council on Youth chargé d’établir les priorités et de définir les budgets de la politique jeune du Conseil de l’Europe.
Le Advisory Council est composé de 30 représentants d’ONGs. Au milieu des 30 visages, il y a une fille voilée, c’est celle là que vise les “Francs-Tireurs”.
Le FEMYSO a bien reçu des sous du Fond Européen pour la Jeunesse (dont la mission est de filer des sous à des organisations de jeunesse à travers l’Europe). En 2014 et 2015, 24 980 euros à titre de subventions structurelles.
A titre de comparaison, la International Lesbian Gay Bisexual Transgender and Queer Youth and Student Organisation, a reçu 47 520 euros, la European Union Of Jewish Students a reçu 32 600 euros et la World Association of Girl Guides and Girl Scouts Europe Office a reçu 34 120 euros.
Les fans antisémites et islamophobes de Franc-Tireur pourront ainsi calculer combien on peut se faire à l’intersectionnel si on est un.e scoute juive lesbienne qui porte le voile.
Le FEMYSO a aussi reçu 16 500 en 2021, pour le programme “Step up and take action: Youth for environmental sustainability and climate action”.
Ce que Franc-Tireur n’hésite pas, de façon parfaitement diffamatoire, à qualifier de programme de radicalisation des jeunes musulmans d’Europe est en réalité un programme pour le climat. L’union du vert de l’Islam et de l’écologie certainement…
Cette page regroupe en toute transparencetous les programmes et ONG supportés par ce fond depuis 2014
En additionnant toutes les lignes où apparait le FEMYSO dans ces documents, on atteint péniblement 150 408 euros entre 2014 et 2021. Pour atteindre les 720 000 euros de financement que l’enquête nous annonce, il faudrait qu’ils aient récolté cinq fois cette somme sur une période équivalente entre 2007 et 2014.
En septembre dernier, le Conseil organisait carrément un atelier en ligne avec le FEMYSO.(…) Sauf que les acteurs jouaient faux. Ils ne visaient pas seulement le racisme anti-musulmans, ce qui mettrait tout le monde d’accord, mais bien l’« islamophobie ».
Il s’agit en fait très exactement du même workshop qui est déjà mentionné plus haut dans l’enquête et lors duquel Hajar el Jahidi est intervenue. Il est ici présenté de façon fallacieuse comme un autre programme afin de démultiplier l’action du Lobby islamiste. Le mot Islamophobie n’apparait nulle part dans la présentation du Workshop.
Il apparait bien dans la Concept Note mais uniquement parce qu’il est fait mention du Rapport de l’Office du haut commissariat aux droits de l’homme de l’ONU et qui porte ce titre…
“Le Forum des jeunes fréristes est subventionné par l’Union ! Au moins 720 000 euros versés depuis 2007 ! De quoi radicaliser, en toute tranquillité, la jeunesse musulmane d’Europe.”
La commission Européenne a bien donné des sous au FEMYSO 65.364,21 euros entre 2015 et 2019 (précisé ici p28)
En fait le FEMYSO a monté des projets Erasmus +. Par exemple pour construire la coopération entre jeunes ou se préoccuper des migrants qui meurent en Méditerranée. La liste et le détail ici.
Sinon, comme on sait combien les chefs du Printemps Républicain, ainsi que tous leurs fans antisémites, aiment ce genre de choses, on est heureux de leur annoncer la bonne nouvelle: le FEMYSO est aussi financé par Soros (et le dit très ouvertement sur son site en FAQ). Ils vont pouvoir se régaler.
“Le collectif [CCIF] s’est réfugié en Belgique, auprès du CCIB, son équivalent belge dont le siège social se situe, oh surprise, à la même adresse que le FEMYSO ! Mais il y a mieux. Franc-Tireur a découvert que la Commission européenne avait financé le CCIF : 810 000 euros de subventions entre 2012 et 2017. Le CCIB, qui prend le relai, vient quant à lui de recevoir 210 000 euros ! Une affaire qui roule.”
En fait Franc-Tireur a découvert ce que les députés d’extrême droite au parlement Européen connaissent déjà. En 2021 les parlementaires d’extrême droite ont posé la question du financement du FEMYSO par l’Union à peu près une fois par mois. Chaque fois sont rappelés les liens idéologiques avec les frêres musulmans, l’infiltration de l’idéologie islamistes, les réseaux d’association… La fameuse question est en fait posée depuis huit ans:
En 2014…
En 2015
En avril et en Juin 2016 par Franz Obermayr
En Décembre 2016 par Steve Briois
En Mars 2021 par Roman Haider et Georg Mayer
En mai 2021 par un collectif d’extrême droite européenne…
En septembre 2021 par Mathilde Androuët…
Encore en novembre evidemment après la fameuse campagne Emmanouil Fragkos nous apprend que le CCIB a la même adresse que le FEMYSO
Pour le financement du CCIF à hauteur de 810 000 euros ça parait quand même beaucoup. Répondant à une question du député d’extrême droite Jordan Bardella sur les liens entre le CCIF et la Commission Européenne et le financement de l’islamisme par l’Europe, la Commission, dans sa réponse, détaille tout ce qu’elle a versé au CCIF entre 2007 et 2021: 51 450 euros. Bardella reprend ce chiffre dans ses autres questions sur le même thème.
Le CCIB, répondant à un appel à projet financé par l’UE à hauteur de 205 000 euros pour un budget total de 250 000 euros a obtenu très exactement 53 119,08 euros.
On ne sait pas d’où vient le chiffre de 210 000 euros avancé par Franc-Tireur.
[La COJEP] remet chaque année un « Prix du Vivre ensemble » (version AKP) à des personnalités qui lui semblent proches de ses idées. Parmi les lauréats : Edwy Plenel ou Rokhaya Diallo, également égérie de l’ENAR (European Network Against Racism). Dirigée par un ancien frère musulman, cette association mène campagne contre la France et sa laïcité depuis des années… grâce aux millions versés par l’Union Européenne !
L’association COJEP est effectivement très fan d’Erdogan et a effectivement remis un prix “Vivre Ensemble” en 2015 à Edwy Plenel, ce qui est régulièrement rappelé par les islamophobes, comme ici par le militant souverainiste antisémite Camarades Charles.
Aucune trace de financement à millions par l’Union Européenne, une simple participation à un programme Erasmus pour les réfugiés.
Aucune trace du passé de Frêre Musulman du Fondateur non plus…
Ces attaques s’adressent plutôt à l’ENAR. L’ancien Frêre Musulman semble être Michael Privot sur qui Franc-Tireur a aussi enquêté:
“Officiellement, l’ENAR est une organisation plus présentable, dirigée par un certain Michaël Privot. Très propre sur lui, il se réclame de l’Islam des Lumières et critique ouvertement l’Arabie saoudite (comme les Frères). S’il dit être un « ancien membre des Frères musulmans », il travaille toujours avec eux (ce que ne font pas les vrais repentis). En réalité, c’est une stratégie habituelle des Frères, nier leur appartenance, pour avancer.”
Cet islamologue belge dit avoir été frère musulman et s’être ensuite détaché de cette organisation (un peu comme Mohammed Louizi, tout à fait en grâce auprès des islamophobes, qui par ailleurs n’hésitent pas à s’autoproclamer “le magazine dela Raison” pour avancer masqué).
Privot travaille avec Ismaël Saidi qui est très proche de Marianne, Rachel Khan et Boucaud-Victoire.
La question du Financement de l’ENAR, de ses liens avec “l’islamosphere” ou “l’islamo-antiracisme” est elle aussi posée par l’extrême droite depuis fort longtemps: en 2007 déjà, ici et ici, en 2012 encore, et encore ici.
“La France en ligne de mire” n’hésite pas à titre Franc-Tireur, qui annonce la révélation d’un scandale:
C’est le vrai scandale que révèle cette affaire. L’ENAR, une mega-structure dopée aux fonds européens, réunit tout ce que comptent l’islamo-antiracisme et la frérosphère, le FEMYSO, l’EFOMW et le CCIB.”
L’ENAR comprend aussi des associations juives comme l’EJCC ou le CEJI dont on sera heureux d’apprendre leur intégration dans la “frêrosphere” décidément élargie, et l’ENAR dispose aussi de ressources contre l’Antisémitisme, mais examinons donc le reste du “vrai scandale”.
Franc-Tireur affirme: Des membres du bureau de l’ENAR sont également membres du FEMYSO, comme Intissar Kherigi, son ancienne présidente, surtout connue pour être la fille de Rached Ghannouchi, le leader des Frères musulmans tunisiens ! De ceux qui ont voulu transformer le printemps tunisien en hiver islamiste. À leurs côtés, on retrouve sans surprise Rokhaya Diallo, signataire de pétitions contre Charlie Hebdo, défenseuse du voile et du CCIF… et membre du bureau de l’ENAR depuis 2013.
Nulle trace de Rokhaya Diallo dans le board de l’ENAR.
Et pour cause, elle n’y apparait plus depuis au moins Juillet 2015
Rached Gannouchi est le leader d’Ennahda un des principaux parti politique de la droite tunisienne, parti qui donc présente des candidats aux élections démocratiques depuis que la démocratie est autorisée. Le parti Ennahda a officiellement pris ses distances avec l’idéologie des Frêres Musulmans lors de son congrès de 2016 où il annonce la séparation du religieux et du politique.
Sa fille, Intissar Kherigi est en thèse à Science Po sur la fabrication des réformes de décentralisation en Tunisie post-révolutionnaire, après une licence de droit du King’s College et un master de la London School of Economics. Ici l’interview qu’elle donnait en 2016 à l’ENAR.
Elle n’est plus ni présidente du FEMYSO ni au bureau de l’ENAR… Avoir un membre du bureau de l’ENAR qui soit aussi un membre d’une autre organisation n’a rien de surprenant, c’est le cas de tous les membres du bureau de l’ENAR. Cependant aucun membre du bureau n’est actuellement membre du FEMYSO.
Le pire n’est pas qu’un faux-nez serve à abriter tout ce que l’Europe compte de militants pro-voile et anti- laïques. Le drame est qu’ils se réunissent et s’organisent contre les valeurs européennes grâce aux millions versés par l’Union. D’après le site de la Commission, l’ENAR a touché un million d’euros en moyenne par an depuis 2007… Soit 22 millions en tout ! Un trésor de guerre pour sa propagande contre la laïcité et l’universalisme.
Un million par an depuis 2007 pour arriver à 22 millions en 2021 cela parait étrange. On a vérifié le principal scoop de Franc-Tireur avec notre calculette en tentant le calcul suivant: 2021 – 2007 pour trouver le nombre d’années durant lesquels l’ENAR a été financé. Le résultat est 14. En multipliant ensuite ce chiffre de 14 années par la somme de un million d’euros reçu en moyenne par an on arrive à 14 millions d’euros. Soit une différence d’avec le “trésor de guerre” de 7 millions d’Euros.
Pour les 4 dernières années, de 2015 à 2021, La liste des projets pour lesquels l’ENAR a reçu des fonds est accessible ici
Aucun de ces projets ne vise spécifiquement la France ou l’universalisme.
Pendant toutes ces années, des associations de quartier défendant l’égalité et la citoyenneté, parfois menacées par les islamistes, ont fermé les unes après les autres. Faute de moyens. Faute de soutiens.
On n’en saura pas plus sur cette affirmation. Cependant on pourra rappeler que le CCIF, pourtant visiblement bien infiltré et disposant du soutien islamiste mondial, de la commission européenne et de Soros a été fermé par Gerald Darmanin sans que celà ne fasse de grande difficulté…
L’enquête de Franc-Tireur n’est pas différente des dizaines d’autres dans le même style parues dans divers journaux ou blogs où les infos sont les mêmes et qui se reprennent mutuellement. Le fact-checking détaillé de celle-ci permettra peut-être de réclamer de la part des “journalistes” produisant ces “enquêtes” un peu plus de sérieux et un peu moins de fanatisme anti-musulman.