Arrestation d’Abdourahmane Ridouane: triple peine pour les militants étrangers

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Abdourahmane Ridouane, président de la mosquée de Pessac, est désormais inculpé pour apologie du terrorisme. Il a été mis en garde à vue pour cette raison.

Il a été initialement interpelé en août. Son titre de séjour ne lui avait pas été renouvelé, malgré des décennies de présence sur le territoire français. Son domicile a été perquisitionné. Première peine pour avoir osé prendre la défense du peuple palestinien.

Depuis le mois d’août, il était en rétention administrative. Il n’y a guère de différence entre la prison et la rétention, si ce n’est que la seconde a lieu sans condamnation pénale. Abdourahmane Ridouane était privé de sa liberté d’aller et venir, il n’avait pas le droit à internet et donc de se défendre face aux accusations politiques portées contre lui dans les médias et sur les réseaux. Sciemment, il a été enfermé dans un centre de rétention à des centaines de kilomètres de chez lui : il a donc été privé des visites régulières de son épouse et de ses proches. Double peine parce qu’il est immigré.

Alors que le délai légal de rétention allait se terminer, il a été transféré ce 30 octobre au commissariat et placé en garde à vue pour “ apologie du terrorisme”. Triple peine, après avoir utilisé toutes les possibilités offertes par la législation contre les immigrés.

Militants et militantes des droits humains, musulmans ou non, nous sommes solidaires d’Abdourahmane Ridouane et de l’intégralité de ses propos publics, que nous partageons sans exception ni aucune réserve. Le délit d'”apologie du terrorisme” est un délit politique, une infraction aux contours suffisamment flous pour que son application dépende uniquement du pouvoir en place et de ses choix diplomatiques.

Aujourd’hui, on peut être un admirateur de Netanyahu, le mettre en photo de profil, l’applaudir lorsqu’il massacre des civils quotidiennement. Ce n’est pas de l’apologie du terrorisme.

La terreur en Palestine, même celle des enfants, n’est pas considérée comme un sentiment venant d’êtres suffisamment humains pour être des victimes de “terrorisme”.

Les dirigeants palestiniens peuvent être exécutés sans procès par Israel, dans le cadre d’opérations extérieures en pays étranger, et en tuant des civils au passage, sans que ce soit considéré comme un attentat. Et l’on devrait se taire lorsqu’ils sont assassinés au mépris de toutes les règles du droit international ? À combien de dirigeants de pays musulmans cette règle va-t-elle être étendue dans l’avenir, en cette période de guerre généralisée ?

Militantes et militants contre la politique raciste en matière d’immigration, nous ne sommes pas dupes de l’utilisation spécifique de l’internement administratif des étrangers pour punir toutes celles et ceux qui n’ont pas la nationalité française et museler les immigrés. Abdourahmane Ridouane vient de purger presque trois mois d’une peine de prison qui ne dit pas son nom, simplement pour avoir exprimé une opinion. Ce qui est en jeu aujourd’hui, au-delà de son cas personnel, comme cela l’a été pour de nombreux imams expulsés dans l’indifférence, ce sont les libertés civiles accordées en France, indépendamment de la nationalité française.

Le gouvernement français applique désormais le principe de la préférence nationale aux libertés fondamentales, la liberté d’expression, la liberté de conscience, la liberté de culte.

Militants et militantes contre l’islamophobie, nous constatons que la triple peine pour Abdourahmane Ridouane existe parce qu’il est musulman et président de mosquée : une mosquée que le gouvernement a tenté en vain de fermer en 2022. Mauvais perdant devant la justice de son pays, Darmanin s’est acharné sur Abdourahamne Ridouane faute d’avoir pu détruire la mosquée dont il était président ? Qu’à cela ne tienne, Retailleau prend le relais.

Nous ne pouvons empêcher la souffrance infligée à un homme musulman et sa famille. Pas plus pour Abdourahmane Ridouane que pour d’autres dont les droits sont bafoués et les vies détruites actuellement. Mais chacun a le devoir de dire la vérité face à un pouvoir tyrannique :  le gouvernement français se couvre de honte et met en Lumières le courage de ceux qu’il veut détruire.

Involontairement, en punissant la générosité, la dignité et le combat exemplaire contre un génocide, il indique le sentier à suivre, celui de la Justice universelle.