Le Conseil d’état a validé ce mardi 30 août la décision d’expulsion d’Hassan Iquioussen, énième personnalité musulmane cible de la vindicte arbitraire du Ministre de l’Intérieur. Celui-ci a annoncé la nouvelle sur Twitter comme il avait annoncé son intention d’expulser sur le même réseau, avant même toute notification à sa victime. L’islamophobie est aussi une manière de remplacer la démocratie par la communication agressive. La veille, une note des services de renseignement était transmise à Europe 1, dont les employés ont fait un copié-collé laborieux.
L’objet était avant tout de dresser une liste d’islamistes supposés avoir orienté le vote des musulmans pour Jean-Luc Mélenchon. Parmi ces islamistes désignés par un journaliste dont l’indépendance se résume manifestement à faire tenir douze pages de rapport policier sur deux A4, figure notamment Rafik Chekkat, auteur à Lignes de Crêtes, entre autres qualités, et également fondateur du média Islamophobia.
Nous tenons à l’assurer de notre solidarité. Non pas que nous trouvions le moindre souci politique à publier des islamistes réels ou supposés, nous en trouverions plutôt à publier des copistes du Ministère de l’Intérieur. Ni au fait d’appeler à voter et à mobiliser publiquement, cela s’appelle faire de la politique en démocratie. Mais l’islamophobie structurelle portée à son paroxysme répressif est d’abord la tentative d’interdire tout droit au politique aux musulmans. Le mémoire du Ministère de l’Intérieur reprochait à Hassan Iquioussen de lancer des appels au vote, et assimilait la chose à la volonté de créer un califat semblable aux projets de Daech.
Militants de gauche, nous avons une responsabilité dans la banalisation de la répression, de la stigmatisation et de l’intimidation permanente de nos camarades musulmans. Nous refusons l’état de fait discriminatoire, celui qui crée un monde politique à deux vitesses. Le nôtre, où nous disposons de tous nos droits civils et politiques et celui des musulmans, pour qui chaque prise de position publique, chaque engagement, chaque appel à se mobiliser peut être source de problèmes graves avec le pouvoir mais aussi de diffamation dans les médias. Nous refusons le harcèlement d’état pratiqué notamment contre les militantes musulmanes, parmi lesquelles Feïza Ben Mohamed ou Siham Assbague visées par les comptes Twitter du Ministère de l’Intérieur ou des notes policières livrées à la presse. Puis ciblées par la fachosphère, insultées et menacées en permanence, ce qui devrait susciter la réaction immédiate de toutes les féministes.
Malheureusement les activistes musulmans et musulmanes ont appris à lutter dans le chaudron infernal du racisme organisé au plus haut niveau. La répression est leur quotidien, la destruction de leur vie publique et privée également, et un article diffamatoire de plus ou de moins pour Rafik Chekkat ou d’autres ne change rien. Cela ne justifierait en rien notre indifférence, notre apathie et l’intériorisation de l’islamophobie. Les féministes, les défenseurs des droits humains et l’ensemble des militants et directions de la gauche politique ou syndicale doivent se mobiliser maintenant et cesser d’acter la Séparation décidée par le gouvernement. Celle qui fait des musulmans et des musulmanes, des êtres humains de seconde zone privés de l’exercice de leurs droits civils et politiques. Il ne s’agit pas de soutenir de manière paternaliste la communauté musulmane qui résiste seule de manière exemplaire. Mais de la cohérence minimale avec nos valeurs affichées qui ne valent rien sans les actes.
Nous serons samedi à 15 heures place de la République avec les organisations musulmanes qui appellent à se rassembler contre l’expulsion d’Hassan Iquioussen. Nous espérons y trouver nombreux des camarades de gauche et d’extrême gauche, il est temps.
Ci-dessous le communiqué d’appel de Perspectives Musulmanes